Ce qui ne dure, derrière les murs [Pv Maelstrom Rage]

La pièce était close et froide, d’autant plus qu’elle renfermait cette chose. Les murs étaient dressés, telle une sentence, ne comportant aucunes fenêtres et la seule lumière apparente était celle du couloir qui se diffusait timidement par la minuscule ouverture sertie de barreaux. Tout était sobre et délabré. Il n’y avait aucuns meubles dans cette salle, si ce n’est le banc de pierre dans le fond, étroit et dur, et cette sorte de cabinet, inutilisable depuis bien longtemps (Y débordait d’ailleurs souvent les égouts en putréfaction). Une ambiance tout à fait charmante et gaie constatez vous, où l’on ne pouvait trouver que ces longues trainés d’eau pour habiller les murs, comme des miroirs, réflecteurs de tant d’années de solitude. Une odeur humide et glacée rendait l’atmosphère plus sinistre, si elle pue d’avantage l’être même.
Au-delà du bilan matériel, il régnait un silence de plomb, quand bien même le cri atroce d’un détenu -montant des profondeurs obscures du bâtiment- ne venait pas troubler ce repos éternel que menait la chose. Nombreux étaient ceux qui connaissaient quotidiennement la souffrance ici bas. Ce n’était d’ailleurs qu’une question d’habitude, ne s’y faisait on pas à force ? Pour certitude : La torture était une promesse de mort, ou pas…

Allongée sur le long banc de pierre, une silhouette se distinguait peu à peu et à grande peine dans la pénombre qui sévissait à l’intérieure de la minuscule cellule de l’internée. Le corps de cette chose était rigide de façon presque cadavérique mais sa respiration était régulière et semblait profonde. J’ai bien dis, semblait. Car à peine venais je de finir ma phrase que deux billes d’un bleu intense naquirent parmi le gris alentour, dénotant même une touche de rougeâtre par ses vaisseaux sanguin apparent dans le blanc de son globe. Sadique et Persécuteur étaient de mise. Terrifiant donc, mais beaux, ce regard s’accompagna d’un sourire, dévoilant deux canines pointues et brillantes qui rendirent le spectacle de plus en plus flippant, de moins en moins humain... Ce sourire se découpait en demi lune et était encadré de deux lèvres couleur prune dont plusieurs croûtes couvraient la surface. Au dessus, un nez, droit et sans aucunes bosses, portaient d’anciennes traces de sang, auxquelles l’individu ne prêtait plus attention depuis longtemps.. Du reste, on découvrit le teint plus que blafard, lugubre, de la personne qui s’avéra être une immense femme aux cheveux d’un noir corbeau tirant vers le violet, d’un charme et d’un aura de frayeur sans pareil. Son visage, bien que porteur de plusieurs coupures, était ravissant et non moins ensorcelant que si celui-ci avait été propre et frais. Son corps était élancé et musclé, quoique beaucoup affaiblie et amaigrit durant toutes ces années, et on lui pressentait cette agilité bien connue aux félins, et que malgré ces nombreux hématomes et ces blessures inquiétantes, infectées même, elle honorerait avec autant de sauvagerie et de précision qu’à la coutume. Pourrait on dire à présent que la jeune femme rayonnait et se faisait joyaux de la salle dans laquelle elle croupissait depuis 76 ans ?
76 ans. 76 années de tortures et de douleurs, pour 8 années de cavales et de tueries. Il fallait payer le prix fort, tout comme le paysans, réduis en insignifiant travailleurs de terres, en esclaves assouvis et misérables, qui offre sa vie pour survivre. Machination et incohérence démesurée.
76 ans. Une performance remarquable au sein de ce cachot infernale où l’on ne survivait guère plus d’une dizaine d’années et de mémoires d’hommes, personne ne se souvenait qu’un quelconque détenu ait survécue plus de 7 ans même !

On la connaissait jadis sous le nom de Cicely, tueuse mémorable et pourvue d’une cruauté sans limite. Elle l’était pour sûr, mais elle ne l’était pas sans son fidèle et tant aimé frère et compagnon d’armes, Santargö, qu’elle ne revue plus depuis sa détention à l’Asile d’Arcanae, le royaume du Nord. On dit également qu’elle fut l’une des trois élèves du colossale Maelstrom Rage et que sa beauté n’a d’égale que son efficacité à commettre les pires vices. On la connaissait… Et on l’a dès lors bien oubliée, si bien que, celle-ci n’est plus que cobaye d’argile entre les mains de ces scientifiques désireux et fous. Et son existence est alors réduite à simple poussière alors qu’elle était promise à un avenir brillant et à devenir comète, étoile… Attendant encore son heure, elle médite sur, et méprise, l’avenir.

La jeune femme se déplaça enfin dans un mouvement sec, souple et rapide et s’avança jusqu’à la porte où elle jeta un rapide coup d’oeil avec une désinvolture presque déconcertante. Ce n’était qu’une question de minutes avant que les gardiens ne viennent apporté ce plateau garnit de ce qu’il appelait nourriture. Du pain sec et moisit, de l’eau parfois croupie, des raisins secs ou des lentilles misent en bouillie avec du rhum, parfois les jours de fête une cuisse de dinde et un demi sucre, servaient pour seul repas, deux fois par jour, 730 fois par an, 55480 fois pour 76 ans. Autant dire que ce n’était pas abondance et caprice de gourmande tous les jours. D’ailleurs la jeune femme avait les joues creusées et les omoplates ainsi que les genoux osseux et peut être quelques peu saillants, résultat des mauvais traitements rendue dans cette prison.

Cicely se détourna alors en se grattant péniblement les côtes à travers la longue toge sale qui lui servait de vêtement et accessoirement de chiffon, et s’éloigna dans un des coins obscurs afin de passer inaperçue. Elle shoota négligemment, au passage, dans les vestiges de son premier repas avant d’émettre un petit grognement doté d’une pointe de férocité et d’agacement. Elle parvint enfin dans le noir lorsqu’elle entendit subitement un pas du fond de l’interminable couloir du niveau 1, caractérisé par son assurance et sa rapidité, un pas inhabituel et pourtant si reconnaissable… Un souvenir…. Un serment aphone et porteur d’espoir.

Le pas continuait de s’avancer, claquant de sa talonnette et de son assurance sur les dalles de pierres sombres et froides, et ce n’était qu’une question de minutes avant que celui-ci ne parvienne jusqu’à sa cellule.
La jeune femme quand à elle était restée dans l’ombre, figée et parfaitement muette, et son sang pourtant bouillonnait, à l’intérieur de son corps frêle, tel le messager annonçant la réalisation de son souhait. C’était une impression étrange et confondue, excitante par ce désir de liberté et parfois même terrifiante par sa probabilité incertaine. Mais qui aurait put croire à une mauvaise blague, à une condition de délire absolue de la part de Mademoiselle de Velvroström ? Personne, je suppose.
La porte s’ouvrit enfin, diffusant un peu plus de lumière dans la tombe où croupissait Cicely. Son cœur cognait dans sa poitrine, comme si ce dernière avait subit un entraînement militaire intensif et qu’il se trouvait à court de souffle. Peut être même pouvait on entendre les pulsions, plus que des battements, qui faisaient rage en elle. Tout son être clamait les mêmes paroles….

Maelström Rage a écrit:

- Veux-tu un peu de lumière mon Enfant ?

La voix fut grave, la phrase sans appel, et c’est à peine si elle fut prononcée que déjà, l’enfant en question rechuta froidement et étira la commissure de ses lèvres dans un sourire joyeusement démoniaque dont celui-ci n’avait plus été tentée depuis bien longtemps…
Il faut savoir qu’à cet instant, seul un héro tel que Robinson Crusoé aurait pus éventuellement comprendre ce que ressentait la jeune femme. Isolée du monde extérieur, Cicely n’avait eût que pour seul rattachement à la vie des souvenirs qui, au fil des années, se tarissaient pour enfin souvent disparaître. Mais seuls demeuraient, les anciens démons de sa jeunesse passée : les visages fiers et irremplaçables de son unique frère et de son maître et tuteur, et malgré toute sa mauvaise volonté et ses facultés émotionnelles restreintes, ils parvenaient à être de ces rares personnes auxquelles Cicely portait un intérêt, ou du moins une compassion ou une admiration quelconque. Des êtres chers à sa chair donc autant qu’à son âme et ne pourrait on parler encore de chers à son cœur puisqu’il est purement inconcevable que Cicely en eût un (d’un point de vu émotionnel toujours).
Ce fut donc une belle surprise que de retrouver, là, à quelques mètres d’elle, l’un des grands joyaux de son existence, son mentor, Maelstom Rage.
Brusquement, la jeune femme rasa le mur jusqu’à la porte et y laissa dépasser sa tête, baissée, avant même de dévoiler son corps ravagé aux yeux du vieux sage. Un pas après l’autre, elle s’avança, de manière gracieuse. Cet incroyable symbole restait impassible, et peut être avait il vieillie d’après son souvenir de jadis. Mais seul son œil pétillant dénotait une jeunesse mêlée d’une sagesse infinie. Doux antagonisme, oui.
Elle s’arrêta du sujet à un mètre pile, comme il était coutume autrefois, et elle défroissa inutilement un pan de sa robe sale. Ce fut seulement à cet instant qu’elle relava la tête dans un craquement dégoûtant et qu’elle prononça avec fermeté et non sans un immense respect et une grande gratitude :

- Il était temps.

[…]

Après ces retrouvailles, Cicely avait eut la faveur de pouvoir récupérer son équipement, et parmi celui-ci, ses armes principalement. En tant que tueuse, il était indéniable que celle-ci n’en ait pas une panoplie, mais lorsque on lui présenta le tout, la jeune femme afficha une mine consternée devant l’étendu des dégâts.

- Quel gâchis... Lâcha t-elle sans émotion particulière, tout en signant le papier officiel de sa libération et de la restitution de son armement.

Non affûtées depuis ses 76 ans d’emprisonnement, les lames de ces poignards avaient ternies et ceux-ci étaient consternants à voir. Il fallait s’en douter également, quelques unes des précieuses herbes magiques enfermées dans sa sacoche de cuir avait séchées anormalement et encore heureusement pour elle les plus coûteuses étaient encore intactes. Seules demeuraient parfaits le sabre, la dague incrustée et le gant/arc. Après inspection et avec une petite mine boudeuse, Cicely rangea ses affaires méticuleusement et dans un geste parfaitement habituel.
Une fois fait, il était inqualifiable ce bonheur qu’elle ressentait à porter enfin une tenue descente et en ayant retrouvé l’entière partie d’elle-même, et certainement la meilleure.
La jeune femme était joyeuse, encore plus depuis qu’elle avait put lire sur le visage des détenus la misère de leurs expressions et la fascination qu’elle avait inspirée en passant dans le couloir, devant leur cellule, vers la liberté. Cruauté et Sadisme pour seul pain.
Elle se tourna enfin vers Maelstrom et lui emboîta le pas, alors qu’il se détournait vers l’escalier sans fin, ambiguë et mystérieux comme toujours. C’est alors que, continuant son chemin derrière son maître vers le niveau 0, elle parvint alors en haut, et au lieu de continuer, elle s’arrêta, ne faisant pas cas du gardien qui venait de se heurter à elle.

- Pourquoi ? Et pourquoi maintenant ? demanda t-elle, apparemment remise que partiellement de ses émotions nouvelles.

Il était indéniable que ces questions sous entendaient les interrogations qui tracassaient la jeune femme sur : les raisons de sa libération par le grand sage en personne, ce qui la couvrait de prestige et d’honneur, et le prix de sa libération.. Tant de questions, oui, auxquelles il fallait apporté bien des réponses. De toute manière, était elle plus butée qu’un autre, elle ne bougerait pas d’ici tant qu’elle n’aurait pas eut ce qu’elle voulait.
Tout en écoutant les paroles de son maître, elle jeta une mèche de cheveux aux reflets argentés dernière ses épaules et afficha un sourire malin, accentué par la plissure de ses grands yeux bleus profonds. Elle était belle pour sûr, mais dangereusement, et bien trop d’ignorants tombaient dans ses filets d’aciers et y périssaient. Seulement, et elle le savait pertinemment, ce jeu ne marchait pas avec le grand manitou. Aussi, se contenta t-elle de masser son épaule dans le but de faire diversion peut être, fasse à son insolence. Gênée, comme rarement, elle tenta :

- Pourrais je avoir des explications maître, s'il vous plaît ?

Sa libération donc, mais sa libération après 76 ans tout de même…